extrait de l'introduction...
En descendant d’un minibus à environ 25 km de Harare, la capitale du Zimbabwe, je me suis retrouvée à errer sur un long chemin de terre, avec pour seul horizon de longues prairies à perte de vue dans toutes les directions. J’entendais le son léger du mbira qui voyageait doucement dans le vent, vers moi. Plus nous marchions, plus le mbira était fort, et je me suis vite rendu compte qu’il provenait du centre d’art que nous étions venus visiter, Dzimbanhete. À notre arrivée, nous avons été accueillis par des enfants qui couraient dans tous les sens, deux joueurs de mbira qui jouaient seuls sans se soucier des nouveaux arrivants, et un guérisseur résident qui est venu nous saluer. On nous a fait visiter la galerie, l’espace de guérison, les nombreux bâtiments construits de manière traditionnelle, avec des architectures des diverses parties du continent. Nous avons traversé un champ pour atteindre la scène extérieure du festival annuel de mbira, un lieu qui contient des anciennes peintures rupestres San, et tout cela avec une bière traditionnelle à la main. Il y avait quelque chose de très profondément familier dans ce lieu et dans les choix que faisaient ces artistes. Il y avait clairement une banalité quotidienne et domestique dans cet espace artistique, ainsi que le sentiment très distinct d’un peuple qui s’est habitué à la formation critique, aux terminologies historiques de l’esthétique et de l’art, aux résidences artistiques euro-américaines et aux biennales mondiales de la scène artistique contemporaine ; mais on y ressentait également un enracinement très profond dans le contexte, l’histoire, la communauté et la motivation. Ils faisaient des choix sur ce qui importait le plus pour leur propre pratique, et cherchaient des stratégies pour tester, expérimenter et explorer des manières de faire de l’art et de vivre en commun. Ces artistes entremêlaient leurs communautés, leurs territoires, leurs urgences politiques, leurs imaginaires créatifs et leurs pratiques artistiques, afin de créer un espace pour une manière d’être qui m’a à la fois profondément inspirée, mais qui a aussi déclenché un besoin de réfléchir ensemble à ce qui se passait ici.
Common Life est une expérience de réflexion commune. C’est une occasion d’explorer et de tester des stratégies de pratique artistique qui sont profondément attachées aux lieux d’où elles ont émergé, et qui sont fortement engagées envers le potentiel de l’art à générer des manières de vivre ensemble, en commun. Il s’agit d’une contribution relativement modeste, développée sur une période de 18 mois, à un sujet vaste et large qui vise à poser des grandes questions et à nager dans les merveilleuses possibilités que les initiatives artistiques sur le continent africain créent, testent et avec lesquelles elles jouent tous les jours. Common Life est une invitation à la recherche curieuse et au rêve partagé.
Le projet est guidé par la nécessité de prendre au sérieux les manières d’organiser et de faire de l’art en communauté, sur le continent africain. Ce faisant, nous proposons potentiellement des stratégies de pratiques pertinentes pour les lieux que nous habitons, mais aussi au-delà de nos localités, des manières d’être et des pratiques de vie qui émergent des spécificités de nos contextes. Le projet est également guidé par la prémisse fondamentale des praticiens de cette recherche, à savoir que la pratique artistique a un rôle à jouer dans le recentrage de la dignité africaine et la reconnaissance de ce qui est incommensurablement sacré dans la vie.
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